Conjoncture agricole Hauts-de-France d’avril 2020
GRANDES CULTURES
Des exportations record de blé vers les pays tiers
Les cours français du blé tendre en France évoluent positivement en avril et s’installent au-dessus de la barre des 200 €/t, rejoignant ainsi le niveau de prix de mi-janvier. Ils profitent d’une demande internationale dynamique et de l’inquiétude des acteurs due au déficit hydrique en Mer Noire et en Europe du Nord.
Malgré la crise liée au coronavirus, le blé français demeure très attractif en avril pour nombre de pays tiers, comme l’illustre la vente à l’Égypte de 180 Kt. Il bénéficie d’une parité €uro/US$ favorable et d’une chaîne d’exportation encore efficace malgré les difficultés de logistique. Dans son rapport mensuel, FranceAgriMer révise à la hausse les exportations de blé tendre pays tiers à 13,2 millions de tonnes, contre 12,7 estimés le mois dernier. Cependant ces bons chiffres ne suffisent pas à compenser une baisse des volumes constatée en intracommunautaire, ainsi que sur le marché intérieur, notamment dans le secteur de la meunerie et de l’éthanol. Par conséquent, le stock final au 30 juin, donc en fin de campagne actuelle, est revu en hausse à 2,61 millions de tonnes, contre 2,45 estimés le mois dernier et 2,49 l’an passé.
Pour l’orge, les exportations pays-tiers progressent légèrement, à la faveur d’une demande importante, notamment de la part de l’Arabie Saoudite. Sur le marché intérieur, les inquiétudes concernent l’orge de malterie, conséquence des difficultés rencontrées par l ’industrie de la brasserie.
Au niveau européen, les exportations de blé s’affichent cette année à 27,97 millions de tonnes au 26 avril, contre 17,16 millions de tonnes l’an passé au 21 avril. Les exports d’orges s’affichent à 6,13 millions de tonnes contre 3,77 millions.
Selon la Commission européenne, le déficit hydrique qui touche une majeure partie de l’Europe pourrait impacter à la baisse les rendements en blé tendre pour la prochaine récolte, par rapport à la moyenne des 5 dernières années.
État des cultures en région
Céréales : Selon FranceAgriMer, au 4 mai 2020, les conditions de cultures se dégradent en région par rapport à 2019, avec un état jugé bon à excellent à hauteur de 78 % pour le blé tendre (contre 88 % en 2019), 68 % pour l’orge d’hiver (contre 88 % en 2019) et 56 % pour l’orge de printemps (contre 92 % en 2019). Les stades des cultures sont, par rapport à l’an passé, légèrement en avance pour l’orge d’hiver, similaires pour le blé tendre et plutôt en retard pour l’orge de printemps.
POMME DE TERRE
Recherche de débouchés pour les variétés industrielles
L’activité industrielle tourne au ralenti et concerne essentiellement la fabrication de chips et de flocons, ainsi que très partiellement la frite. Le marché à terme affiche des prix bas, inférieurs au coût de production. Selon la filière, plus de 2 millions de tonnes ne seront probablement pas transformées dans les seuls pays du NEPG(*) dont 500 000 tonnes en France. La filière est à la recherche de débouchés alternatifs avec tous les acteurs concernés (féculerie, alimentation animale, méthanisation, compostage, don, etc...).
En frais, la demande est entretenue par la GMS. Elle est soutenue pour des variétés industrielles de qualités lavables. La très belle qualité reste difficile à trouver et les cours sont élevés, notamment en chair ferme.
A l’export, le courant d’affaires reste dynamique vers l’Italie et les Pays de l’Est. Les travaux de plantation sont achevés et ont bénéficié de bonnes conditions de réalisation. Les surfaces sont stables, voire en légère baisse. On signale des quantités résiduelles importantes de plants qui ne seront en terre.
(*) NEPG (groupement des producteurs de pommes de terre du Nord-Ouest européen, F+B+NL+D+GB).
VIANDE BOVINE
Des prix qui restent bas
En vaches laitières de réforme, les cours se maintiennent grâce à une demande toujours soutenue en viande hachée. En vaches allaitantes, la demande subit davantage l’absence de la restauration hors domicile et les cours se maintiennent au-dessus des valeurs de 2018, mais restent inférieurs de 9 à 12 centimes à celles de 2019.
En jeunes bovins, les cours sont au plus bas depuis 2018. Les stocks de jeunes bovins à la ferme augmentent et les éleveurs sont contraints de vendre leurs animaux avant qu’ils ne soient trop lourds. Le marché européen est encombré et les prix baissent.
VIANDE PORCINE
Des marchés sous pression
Le marché porcin européen est encombré et la baisse des cours est de rigueur sur l’ensemble des bassins de production (Allemagne, Italie, Espagne). En France, le marché intérieur pâtit de l’absence de la restauration hors domicile. À l’export, la demande chinoise reste soutenue, mais il faut prendre en compte la concurrence très agressive des USA.
En avril, le cours du porc décroche à nouveau de 4 centimes pour s’afficher à 1,69 €/kg. Le cours moyen 2020 depuis janvier s’établit à 1,71 €/kg, soit supérieur de 20 % à celui de 2019 sur la même période.
Sur le mois de mars l’activité d’abattage en région est en hausse de 0,8 % en volume par rapport à mars 2019. Sur le premier trimestre, les abattages sont néanmoins en baisse de 4,1 % en volume par rapport à 2019.
ENDIVES
Un niveau de prix inédit
La fin de campagne se déroule dans un contexte très favorable, avec un niveau de prix inédit. Le marché reste ferme une majeure partie du mois, avec des volumes insuffisamment disponibles pour satisfaire la demande. Les cours continuent leur ascension, pour atteindre et dépasser les 3€ HT/kg à l’expédition à la mi-avril. Dans la dernière décade, les consommateurs se tournent progressivement vers des produits de saison de plus en plus présents et délaissent l’endive, produit devenu onéreux. Les cours se replient tout en restant à des niveaux élevés.
La saison se termine fin avril avec quinze jours d’avance et se poursuit avec une production mesurée en endive d’été, permettant de maintenir le marché jusqu’au démarrage de la prochaine campagne. Les semis ont débuté en avril et sont avancés à hauteur de 50 %. Les conditions de sécheresse des sols, observées depuis la mi-mars, perturbent les levées et retardent la fin de semis. Les surfaces sont stables, avec un engouement pour la production de jeunes pousses.
LAIT
Une production difficile à maîtriser face à une demande restreinte
En mars, la production régionale de lait de vache est inférieure de 0,7 % à celle de mars 2019. Sur le premier trimestre 2020, la collecte progresse néanmoins de 0,6 % par rapport à 2019, le niveau de prix élevé du lait incitant les éleveurs à produire. La tendance serait à un ralentissement de la collecte en avril, conséquence d’une pousse de l’herbe pénalisée par la sécheresse. En mars, le prix moyen payé au producteur s’établit à 347 €/1000 litres. Il poursuit sa baisse saisonnière à l’approche du pic de production, mais reste cependant supérieur de 1,7 % par rapport à mars 2019. Plusieurs groupes laitiers ont décidé de baisser le prix du lait de printemps, pour inciter leurs livreurs à la modération dans leurs livraisons printanières. La Commission européenne a réactivé l’aide au stockage privé, afin d’encourager les laiteries à stocker et ainsi limiter l’effondrement des cours. Toutefois, les volumes en jeu sont limités. En dehors de la France et de l’Italie, peu de transformateurs laitiers incitent leurs livreurs à la modération. L’ajustement de la production par rapport à la demande sera difficile à réaliser et une baisse des cours du lait est probable au printemps.
PÊCHE
Face au confinement la pêche se réorganise
En avril, le monde de la pêche tente de se réorganiser, afin de répondre à un marché devenu étroit et porté essentiellement par la grande distribution. Cette réorganisation passe par l’identification d’une offre, en espèces et en tonnage, répondant aux besoins des mareyeurs. Malgré la reprise d’activité de certains chalutiers, les apports restent limités. Le maquereau et le merlan sont les espèces les plus représentatives, suivis du hareng et du chinchard dans des proportions égales. L’essentiel des arrivages est orienté vers les GMS, qui limitent le rayon marée par manque de personnels. L’activité à l’importation provient de la pêche hauturière, avec une débarque hebdomadaire, qui propose essentiellement du lieu noir, espèce basique de la grande consommation et, accessoirement, de l’églefin et du merlan. Le commerce à l’exportation est très réduit avec un encornet qui se fait très rare dans les filets. Le marché s’équilibre en cours de mois, avec une offre un peu plus étoffée, qui suffit à satisfaire la demande, mais l’équilibre reste précaire. Avec des débarques très mesurées, les prix sont fermes, quasiment stables, inférieurs de 7 % à ceux d’avril 2019.
MÉTÉOROLOGIE
Accentuation de l’assèchement superficiel des sols
Avec 13°C et 12,9°C relevés respectivement sur Lille et Amiens en avril, les températures moyennes mensuelles excèdent les normales de saison de plus de 3°C.
À l’échelle nationale, ce mois d’avril s’avère le 3ème le plus chaud depuis 1900. Les précipitations se révèlent déficitaires par rapport aux normales de 19 % à 24 % respectivement sur Lille et Amiens.
L’ensoleillement régional est excédentaire de plus de 50 % par rapport à la moyenne 1991-2010.
La combinaison de ces trois facteurs, déficit pluviométrique, températures élevées et ensoleillement généreux, contribue à l’accentuation de l’assèchement des sols superficiels observé depuis la mi-mars.
FOCUS DU MOIS
Estimation des surfaces des grandes cultures au 1er mai 2020
Par rapport à l’année dernière, la sole de blé tendre est estimée en recul (-3 % à l’échelle de la région) et concerne tous les départements avec une baisse qui varie entre 2 % et 6 %.
La hausse des surfaces en orge d’hiver et en colza est confirmée à l’échelle régionale (respectivement + 6 % et + 10 %) et concerne également tous les départements. La progression significative de la sole de colza tient dans la faiblesse accidentelle des surfaces de la campagne précédente, confrontée à des arrachages de parcelles semées avec des semences potentiellement contaminées par des OGM.
La sole des céréales de printemps, orge et maïs fourrager, est affichée en hausse. Elle bénéficie du report des surfaces des céréales d’hiver qui n’ont pu être semées cet automne compte-tenu des conditions météorologiques.
L’emblavement en betterave est estimé en repli (-1,6 % à l’échelle de la région) et concerne la plupart des départements, avec une baisse qui varie entre 1 % et 4 %, à l’exception du Pas-de-Calais, en hausse de 2 %. Après la hausse de 20 % de la sole régionale en 2017 du fait de la suppression des quotas européen, le rééquilibrage des surfaces se poursuit cette année, dans un contexte de marché du sucre encombré.
La surface de pomme de terre de consommation est estimée stable en 2020. Depuis 2015, cette surface augmentait chaque année, passant de 75 000 ha à près de 98 000 ha en 2019. La filière alerte toutefois sur le risque de sursaturation de ses segments avals et appelle à réduire les surfaces sous contrat. Les difficultés que rencontre cette année l’industrie de la transformation et les stocks en attente d’écoulement viennent renforcer ces préconisations.
L’estimation des surfaces de protéagineux et maïs grain correspond aux moyennes quinquennales 2015/2019, ou triennale pour la féverole.
Méthodologie :
Les sources utilisées pour établir la présente conjoncture sont l’enquête nationale Terres Labourables vague 2, le dire d’expert ou, à défaut, la moyenne quinquennale ou triennale. Les indicateurs sont utilisés en évolution, par rapport à la référence qui est la statistique agricole annuelle (SAA) de l’année précédente.