Grandes Cultures : les systèmes céréaliers au coeur des assolements des Hauts-de-France
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Une région de grandes cultures
Les Hauts-de-France sont historiquement une région de grandes cultures. La céréaliculture est très présente et le blé tendre domine largement : selon le recensement agricole 2020, il concentre 36 % de la sole agricole régionale contre 16 % en France métropolitaine. Si la région recouvre 8 % de la sole métropolitaine, elle concentre 18 % des surfaces nationales de blé tendre. L’orge, seconde céréale à paille en termes de surfaces couvertes, arrive loin derrière. Le maïs, dans sa double composante grain et fourrage, est également bien implanté, même s’il est moins fréquent qu’en France métropolitaine.
Deux autres cultures jouent également un rôle stratégique dans la région : la betterave sucrière et la pomme de terre. Elles couvrent respectivement 10 % et 6 % de la sole régionale et, surtout, la région concentre 50 % et 60 % des surfaces métropolitaines.
Enfin, le colza est également bien représenté en région. S’il ne couvre qu’un peu plus de 6 % de la sole régionale, cette culture a nettement progressé depuis les années 1970. Elle joue en outre un rôle important dans les systèmes de rotation, notamment ceux avec blé tendre, culture au cœur des assolements de la région.
Globalement, les céréales (y compris le maïs fourrage et ensilage), le colza, la betterave industrielle et la pomme de terre s’étendent sur les trois quarts des terres agricoles régionales.
La prédominance de la céréaliculture
Selon l’enquête dédiée aux pratiques culturales en grandes cultures portant sur la campagne agricole 2020-2021, les grandes cultures couvrent près de 1,6 millions d’ha dans les Hauts- de-France. Dans cette publication, la notion de grandes cultures correspond au périmètre des cultures de cette enquête (encadré 1).
Elle confirme le constat précédent : les terres céréalières dominent largement (figure 1).
Les céréales à paille couvrent près de 930 000 ha au cours de la campagne 2020-2021, soit 60 % des surfaces en grandes cultures. Les parcelles de blé tendre concentrent à elles-seules la moitié des terres de grandes cultures, l’orge arrivant loin derrière avec 9 %. Viennent ensuite les surfaces de betteraves sucrières (12 %), de maïs grain et fourrage (11 %), de colza (7 %) et de pommes de terre (6 %).
Les légumineuses, pois protéagineux et féverole, occupent une place marginale dans les assolements avec 2 % des surfaces de grandes cultures en 2021.
Figure 1 - Répartition des grandes cultures enquêtées en Hauts-de-France selon leur surface en 2021
La prédominance des céréales à paille

Le graphique représente la répartition des cultures agricoles (en pourcentage de surface cultivée) :
- Céréales à paille : 60 % – représentent la majorité de la surface cultivée.
- Betterave sucrière : 12 %
- Maïs : 11 %
- Colza : 7 %
- Pomme de terre : 6 %
- Autres cultures : 2 %
- Légumineuses : 2 %
Source : Agreste – Enquête « Pratiques culturales en grandes cultures » 2021.
Note explicative :
Les céréales à paille comprennent le blé tendre (50 %), l’orge (9 %) et l’avoine (moins de 1 %). Le maïs est appréhendé via ses deux composantes : maïs grain (4 %) et maïs fourrage (7 %).
La catégorie des légumineuses intègre le pois protéagineux (2 %) et la féverole (moins de 1 %). La catégorie « autres » rassemble le lin fibre (2 %) et le sorgho.
L’enquête sur les pratiques culturales en grandes cultures de 2021 est un dispositif essentiel de description des itinéraires techniques mis en place par les agriculteurs.
L’itinéraire technique est l’enchaînement ordonné des interventions techniques (interculture, fertilisation, traitement phytosanitaire, travail du sol, etc.) de la récolte de la précédente culture à celle de la culture étudiée. L’enquête permet également de suivre les phénomènes de rotations des cultures sur plusieurs années.
Cette enquête fait suite aux précédentes enquêtes des campagnes agricoles 1986, 1994, 2001, 2006, 2011 et 2017. Une enquête portant sur l’utilisation des traitements phytosanitaires et sur la fertilisation en grandes cultures en 2014 a également été réalisée.
L’enquête de 2021 porte sur les diverses interventions culturales effectuées lors de la campagne agricole 2021, de la récolte du précédent cultural de 2020 à celle de la culture implantée en 2021.
Les aspects abordés recouvrent de multiples dimensions : précédents culturaux sur 5 ans, interculture, travail du sol, fertilisation, traitements phytosanitaires, irrigation, etc.
Un exemplaire du questionnaire est consultable sur le site Agreste.
Le champ géographique de l’enquête est le territoire national comprenant la France métropolitaine et les départements d’Outre-Mer pour la canne à sucre. Pour une culture donnée, les anciennes régions administratives (selon la nomenclature en vigueur avant 2016) qui contribuent à 95 % de la superficie nationale de la culture ont d’abord été identifiées. Puis, au sein de chacune de ces anciennes régions, les départements permettant de couvrir au moins 90 % de la superficie régionale de la culture ont été sélectionnés. Ces départements devaient en outre couvrir 90 % de la superficie de la nouvelle région pour la culture considérée. Si ce n’était pas le cas, des départements ont été ajoutés afin de respecter ce critère.
L’unité statistique enquêtée est la parcelle culturale : ensemble de terres jointives cultivées en une espèce végétale donnée, conduites selon des pratiques homogènes. Elle ne correspond donc pas toujours à une parcelle au sens du plan cadastral de l’exploitation.
L’enquête concerne les exploitations cultivant au moins 0,5 ha des cultures enquêtées et les parcelles ayant une superficie d’au moins 0,5 ha.
Les parcelles enquêtées sont issues de la base des déclarations de surface des dossiers PAC de 2021. Le tirage de l’échantillon a été effectué culture par culture, selon un tirage à deux degrés. Le premier degré correspond au tirage des exploitations, le second au tirage d’une unique parcelle dans chacune des exploitations tirées précédemment.
Le tirage des exploitations est stratifié selon trois composantes : la conduite en mode biologique de l’exploitation (hors betterave sucrière, canne à sucre, colza et lin fibre), la géographie (département du siège de l’exploitation pour les exploitations non bio, région du siège de l’exploitation pour les exploitations bio) et la taille de l’exploitation (superficie en terres arables de l’exploitation).
Le tirage des parcelles est réalisé dans les exploitations retenues présentant la culture pour laquelle l’exploitation a été sélectionnée. Parmi l’ensemble des parcelles de la culture considérée, une et une seule parcelle est retenue dans l’échantillon.
L’échantillon national est constitué d’un peu plus de 30 500 parcelles (l’interrogation d’une parcelle correspond à un questionnaire). Après suppression des hors champ et des questionnaires restés sans réponse ou avec des réponses trop partielles, un peu plus de 28 000 questionnaires sont exploitables à l’échelle nationale.
Dans les Hauts-de-France, après validation et traitement des données, ce sont 2 475 parcelles enquêtées qui sont retenues pour l’analyse. En 2021, 14 cultures sont enquêtées dans la région : les céréales à paille avec le blé tendre, l’orge de printemps et l’orge d’hiver, l’avoine de printemps et l’avoine d’hiver, le maïs fourrage et le maïs grain, le colza, la betterave sucrière, la pomme de terre, les légumineuses avec le pois protéagineux et la féverole, et enfin le sorgho et le lin fibre.
La quasi-totalité des surfaces de grandes cultures de 2021 ont reçu au moins une fois une céréale à paille sur la période 2017-2021
L’implantation des cultures est planifiée dans une perspective pluriannuelle. Il convient donc d’adopter une perspective temporelle s’étendant sur plusieurs campagnes agricoles successives. Les terres de grandes cultures de 2021 sont ici analysées sur la période quinquennale s’étendant de 2017 à 2021 : combien de fois chaque catégorie de culture est implantée au cours de cette période? La place centrale des céréales à paille se confirme (figure2). En effet, 99 % des surfaces de grandes cultures de 2021 ont été cultivées en céréales à paille au moins une fois sur cinq sur cette période. L’implantation de trois années de céréales à paille sur cinq est de loin la configuration la plus fréquente : plus de la moitié des surfaces des grandes cultures de 2021 sont concernées. Au-delà, près de 14 % l’ont été au moins quatre années. Si le blé tendre domine largement, l’orge et l’avoine sont assez régulièrement intercalés entre les années de blé tendre.
Figure 2 - Répartition des surfaces de grandes cultures de 2021 selon la fréquence d’apparition de chaque culture de 2017 à 2021
99 % des surfaces de grandes cultures de 2021 ont reçu au moins une année de céréales à paille de 2017 à 2021
Figure composée de plusieurs histogrammes représentant la fréquence de retour des cultures sur les parcelles agricoles (en nombre d’années) pour différentes espèces cultivées. Chaque sous-graphique montre la proportion de surfaces où la culture revient après 0 à 5 ans.
Résultats par culture :
- Céréales à paille :
- Aucune rotation (retour annuel) : 1 %
- 1 an : 4 %
- 2 ans : 27 %
- 3 ans : 54 %
- 4 ans : 13 %
- 5 ans : 1 %
- Colza :
- Aucune rotation : 0 %
- 1 an : 60 %
- 2 ans : 35 %
- 3 ans : 5 %
- 4-5 ans : 0 %
- Maïs :
- Aucune rotation : 0 %
- 1 an : 70 %
- 2 ans : 19 %
- 3 ans : 6 %
- 4-5 ans : 0 %
- Betterave sucrière :
- Aucune rotation : 0 %
- 1 an : 51 %
- 2 ans : 41 %
- 3 ans : 7 %
- 4 ans : 1 %
- 5 ans : 0 %
- Pomme de terre :
- Aucune rotation : 0 %
- 1 an : 75 %
- 2 ans : 22 %
- 3 ans : 2 %
- 4-5 ans : 0 %
- Légumineuses :
- Aucune rotation : 0 %
- 1 an : 86 %
- 2 ans : 13 %
- 3 ans : 1 %
- 4-5 ans : 0 %
- Jachères et prairies :
- Aucune rotation : 0 %
- 1 an : 97 %
- 2 ans : 2 %
- 3 ans : 1 %
- 4-5 ans : 0 %
Source : Agreste – Enquête « Pratiques culturales en grandes cultures » 2021.
Note explicative :
Figure « céréales à pailles » : 4 % des surfaces de grandes cultures de 2021 ont été cultivées avec 1 seule année de céréales à paille sur les 5 années de la période 2017- 2021 et 27 % ont été cultivées avec 2 années de céréales à paille sur cette période.
Figure « betterave sucrière » : 51 % des surfaces de grandes cultures de 2021 n’ont jamais reçu de betterave sucrière sur la période 2017 - 2021.
Concernant les autres grandes cultures, la part des surfaces avec au moins une année d’implantation sur cinq est bien plus faible. Cette proportion varie de 49 % pour la betterave sucrière à 14 % pour les légumineuses. De plus, le profil n’est pas le même que pour les céréales à paille : la part des surfaces concernées décroît rapidement au-delà d’une seule année de culture. Cette part devient marginale ou nulle au-delà de deux années.
Cette approche permet de mieux cerner le rôle des différentes cultures dans les systèmes de grandes cultures régionaux.
Le colza est une tête de rotation typique pour préparer le sol avant l’implantation d’une céréale. Si seulement 7 % des surfaces de grandes cultures lui sont consacrées en 2021, près de 40 % de ces surfaces ont reçu au moins une année de colza de 2017 à 2021. Il joue donc un rôle important dans les successions culturales, particulièrement dans son association avec le blé tendre.
Ce phénomène concerne également les autres grandes cultures qualifiées de tête d’assolement.
Les légumineuses offrent un atout considérable dans la gestion agronomique des sols. Développant une relation symbiotique avec des bactéries du genre Rhizobium, elles enrichissent le sol en azote, élément essentiel à la croissance des autres cultures. Toutefois, le constat est clair : les légumineuses sont assez peu présentes dans les rotations culturales des grandes cultures en Hauts-de-France. Près de 86 % des terres de grandes cultures de 2021 n’ont reçu aucune légumineuse en culture principale de 2017 à 2021 et pour celles qui en ont reçu, 13 % ont été cultivées en légumineuses une seule année. Les légumineuses peuvent néanmoins jouer un rôle important à un autre niveau, celui de l’interculture (thématique traitée dans une future publication).
De même, les jachères et les prairies constituent un autre élément potentiellement important des systèmes de rotations en grandes cultures, aussi bien du point de vue de la fertilité des sols que de la biodiversité. Leur poids dans les terres de grandes cultures régionales est toutefois marginal : 97 % des surfaces de grandes cultures de 2021 n’ont reçu aucune jachère ni aucune prairie de 2017 à 2021.
Le colza, un rôle central dans les rotations avec céréales à paille
Outre la nécessité d’une optique temporelle longue, l’enchaînement précis dans lequel se succèdent les grandes cultures sur une même parcelle est un aspect crucial de la logique d’utilisation des terres agricoles. Les successions culturales sont planifiées et obéissent à une logique.
L’étude des précédents culturaux en 2020 confirme le rôle primordial des céréales à paille : un peu plus de la moitié des surfaces de grandes cultures de 2021 ont eu pour précédent une céréale à paille en 2020.
Les céréales à paille constituent la quasi-totalité des précédents des cultures de colza en 2021 (figure 3). De même, plus de 90 % des surfaces cultivées en betterave sucrière et en légumineuses en 2021 ont eu pour précédent une céréale à paille en 2020.
Les précédents en céréales à paille restent largement majoritaires pour les cultures de maïs et de pomme de terre mais à un degré moindre. À côté de ces précédents de céréales à paille qui dominent, près de 16 % des surfaces de maïs de 2021 ont été précédées par un autre maïs en 2020. Enfin, maïs et betterave sucrière constituent ensemble des précédents pour 13 % des surfaces de pommes de terre cultivées en 2021.
Les précédents de céréales à paille apparaissent plus diversifiés : 29 % des surfaces de céréales à paille de 2021 ont été précédées par une céréale à paille en 2020. C’est nettement moins que pour les autres grandes cultures. L’alternance des cultures dans les systèmes de rotation est en effet un levier majeur de gestion agronomique, tant du point de vue de la fertilité des sols que de la lutte contre les ravageurs et maladies des cultures.
Ainsi, betterave sucrière, colza, maïs et pomme de terre sont des précédents pour plus de la moitié des surfaces de céréales à paille de 2021. Ces quatres cultures sont souvent appelés « têtes d’assolement » dans les systèmes céréaliers. Le but est de couper le cycle des céréales à paille, des monocotylédones, avec des plantes d’autres familles (la plupart étant des dicotylédones sauf le maïs), ou dont les dates de semis sont décalées dans le temps (toutes sont des cultures de printemps, sauf le colza). Cela perturbe le cortège d’adventices qui se développent avec les céréales à paille. Ces têtes d’assolement ont aussi des systèmes racinaires pivotants, qui modifient la structure du sol en profondeur quand celui des céréales à paille est plus superficiel.
Le cas du colza est particulier : cette culture est un précédent pour 8 % de l’ensemble des grandes cultures de 2021 mais cette part atteint 14 % pour les seules céréales à paille. D’ailleurs, les précédents de colza sont quasi exclusivement dédiés à la culture céréalière, en particulier celle du blé tendre : 98 % des précédents de colza de 2020 ont été implantés avant la culture d’une céréale à paille en 2021. Le colza est en effet un élément essentiel dans la rotation des systèmes céréaliers. Outre ses rôles de couverture hivernale du sol et de pompe à nitrates, il permet la restitution d’éléments fertilisants (azote, potasse, soufre) importants, notamment pour le blé tendre. Le colza permet aussi de limiter les facteurs de risque associés aux mycotoxines qui se développent dans de nombreuses espèces de céréales.
Bien que les légumineuses jouent un rôle important d’enrichissement du sol en azote, la part des surfaces 2021 ayant une légumineuse comme précédent est anecdotique, sauf pour les céréales à paille où près de 7 % des surfaces sont concernées.
De la même façon, la part des surfaces ayant un précédent cultural de jachère ou de prairies est très marginale, quelle que soit la grande culture considérée.
Figure 3 - Répartition des surfaces de grandes cultures de 2021 selon le précédent cultural en 2020
Les céréales à paille, précédents quasi exclusifs du colza
Tableau croisé indiquant le précédent cultural implanté en 2020 selon les cultures mises en place en 2021. Les pourcentages indiquent la proportion de surfaces ayant eu chaque type de précédent.
Cultures implantées en 2021 et leur précédent cultural (implanté en 2020) :
- Céréales à paille :
- 29 % après céréales à paille
- 13 % après maïs
- 7 % après légumineuses
- 14 % après colza
- 17 % après betterave
- 10 % après pomme de terre
- <3 % après jachères-prairies
- 10 % après autres
- Maïs :
- 69 % après céréales à paille
- 16 % après maïs
- 4 % après betterave
- 5 % après autres
- <3 % pour tous les autres précédents
- Légumineuses :
- 94 % après céréales à paille
- <3 % pour tous les autres précédents
- Colza :
- 99 % après céréales à paille
- <3 % pour tous les autres précédents
- Betterave :
- 93 % après céréales à paille
- 3 % après maïs
- <3 % pour tous les autres précédents
- Pomme de terre :
- 77 % après céréales à paille
- 7 % après maïs
- 7 % après betterave
- 7 % après autres
- <3 % pour tous les autres précédents
Source : Agreste – Enquête « Pratiques culturales en grandes cultures » 2021.
Note explicative : 29 % des surfaces de céréales à paille de 2021 ont eu pour précédent une céréale à paille en 2020. 13 % ont eu du maïs pour précédent, 14 % du colza, 17 % de la betterave sucrière ou encore 10 % de la pomme de terre.
Les rotations des cultures, un levier agronomique essentiel
Si l’étude des seuls précédents culturaux de 2020 offre un éclairage intéressant, associations et successions culturales sont organisées et pilotées sur des temporalités plus longues dans différents systèmes de rotations.
La rotation culturale est la succession de cultures dans un ordre réfléchi et planifié au fil des années sur une même parcelle. Elle se caractérise par la diversification des familles de cultures, le choix d’une durée de cycle de rotation et l’alternance entre cultures d’hiver et de printemps. Elle constitue un important levier agronomique pour améliorer la qualité et la fertilité des sols, faciliter la maitrise de la flore adventice, des maladies et ravageurs des cultures en interférant avec les cycles des bioagresseurs, permettant de réduire l’utilisation d’intrants.
En outre, chaque culture va mobiliser différemment les ressources du sol, certaines étant par exemple plus gourmandes en azote que d’autres. De même, des cultures successives à enracinements différents permettent d’améliorer la structure du sol : les racines pivotantes d’une culture de colza ou d’une légumineuse aèrent le sol en profondeur tandis que les racines fasciculées des céréales structurent l’horizon superficiel du sol.
La rotation s’oppose à la mono- culture, source de nombreux problèmes : appauvrissement des sols par épuisement des nutriments (une culture unique va toujours extraire les mêmes éléments du sol), contribution à la propagation des maladies et adventices (les bioagresseurs spécifiques à la culture se multiplient rapidement et s’habituent aux traitements) et à l’érosion des sols et de la biodiversité. Le nombre de cultures distinctes intégrées sur une période de temps donnée est un élément central des systèmes de rotation. La durée des rotations est ici envisagée par le nombre de catégories de culture mobilisées sur cinq années successives, de 2017 à 2021.
13 % des surfaces de grandes cultures de 2021 en rotation longue
Les rotations sont qualifiées de longues dès lors qu’elles mobilisent au moins quatre catégories de culture au sens de la nomenclature considérée. Sur les terres de grandes cultures régionales, près de 13 % des surfaces de 2021 (figure 4) ont reçu au moins quatre catégories de cultures distinctes sur la période 2017-2021, essentiellement quatre catégories, les terres en ayant reçu cinq sont marginales.
Au sein de ces rotations longues, les associations des grandes cultures phares de la région sont évidemment présentes. Par exemple les deux combinaisons « céréales à paille & colza & betterave industrielle & pomme de terre » et « céréales à paille & maïs & betterave industrielle & pomme de terre » sur 5 ans représentent respectivement 1,6 % et 1,1 % des surfaces de grandes cultures de 2021. Toutefois, les autres catégories de culture sont plus fréquentes dans le cadre de rotations longues. Les rotations pour lesquelles au moins une année sur cinq est cultivée en légumineuses et/ou laissées en prairies ou jachères concernent 17 % de l’ensemble des surfaces cultivées en 2021. Cette proportion grimpe à 27 % dans le cadre des seules rotations longues.
Ces rotations longues sont bien plus favorables à la préservation des sols et de leur fertilité, et au maintien de la biodiversité. Elles jouent un rôle de premier plan dans les pratiques agroécologiques.
Plus de la moitié des terres de grandes cultures de 2021 en rotation moyenne
Les rotations moyennes sont définies par l’association de trois catégories de cultures de 2017 à 2021. Elles sont majoritaires dans la région (figure 4) : 57 % des terres de grandes cultures de 2021 sont insérées dans des systèmes de rotations moyennes. Trois systèmes se distinguent.
Le premier triptyque associe céréales à paille, colza et betterave sucrière : il concentre 13 % des terres de grandes cultures de 2021. Pour la grande majorité des surfaces concernées par cette rotation, trois années de céréales à paille sont associées à une année de colza et une année de betterave sucrière.
Le second système de rotation repose sur les céréales à paille, les betteraves sucrières et les pommes de terre : près de 6 % des surfaces de 2021 sont concernées. Là aussi, pour près de 70 % des surfaces, trois années de céréales à paille sont associées à une année de betterave sucrière et une année de pomme de terre. Pour un quart des surfaces, ce sont deux années de céréales à paille, deux années de betterave sucrière et une année de pomme de terre qui forment la rotation sur cinq ans.
La troisième association, qui implique près de 6 % des surfaces, combine céréales à paille, maïs et betteraves sucrières. Comme pour les deux triptyques précédents, les céréales à paille dominent : trois quarts des surfaces reçoivent trois années de céréales à paille, une année de maïs et une année de betterave sucrière.
Près d’un tiers des surfaces de grandes cultures de 2021 en rotation courte
Les rotations qualifiées de courtes se composent au maximum de deux items de culture. Près de 30 % des terres de grandes cultures de 2021 relèvent de rotations courtes sur la période 2017-2021 (figure 4). Trois types d’associations strictes entre deux catégories de culture dominent. La première réunit céréales à paille et maïs. Pour la moitié des surfaces impliquées, la rotation se compose de trois années de céréales à paille et de deux années de maïs. Sur le reste des terres, quatre années de céréales à paille sont associées à une année de maïs ou deux années de céréales à paille à trois années de maïs.
La seconde association repose sur les céréales à paille et le colza. Les rotations de ce couple reposent plus ou moins à part égale entre trois années de céréales à paille et deux années de colza d’une part, et quatre années de céréales à paille et une année de colza d’autre part.
Enfin, la troisième dyade associe céréales à paille et betteraves sucrières. Pour près de 60 % des surfaces, quatre années de céréales à paille forment la rotation avec une année de betterave sucrière. Un tiers des surfaces associent trois années de céréales à paille et deux années de betterave sucrière.
Les monocultures de céréales à paille ou de maïs, ne représentent qu’une fraction marginale des terres de grandes cultures régionales. Seulement 1 % des surfaces de céréales à paille de 2021 sont cultivées en céréales à paille depuis 2017, de même pour le maïs.
Il convient de préciser que le nombre de cultures identifiées dans le système de rotation dépend de la durée envisagée (ici cinq années, de 2017 à 2021) et surtout de l’échelle plus ou moins agrégée de la nomenclature mobilisée. Ainsi, parmi ces surfaces en monoculture de céréales à paille, 41 % sont de pures monocultures de blé tendre sur cinq ans. Plus de la moitié correspondent donc plutôt à des alternances de différences céréales à paille. Outre le blé tendre omniprésent, ces monocultures de céréales à paille sont également composées d’orge et, dans une moindre mesure, d’avoine.
Au-delà de ces monocultures sur cinq années successives, certaines cultures peuvent prendre place sur une même parcelle plusieurs années de suite. Si seulement 1 % des terres sont des monocultures de céréales à paille sur cinq ans, près de 12 % des surfaces ayant reçu des céréales à paille de 2017 à 2021 ont été cultivées en céréales à paille au moins 3 années consécutives. Pour le maïs, cette proportion est de 4 %.
Figure 4 - Répartition des surfaces de grandes cultures de 2021 selon le type de rotation et principales associations culturales de 2017 à 2021
13 % des surfaces de grandes cultures de 2021 ont reçu au moins 4 catégories de cultures différentes de 2017 à 2021

Le graphique présente la répartition des surfaces de grandes cultures de 2021 selon le type de rotation et les principales associations culturales de 2017 à 2021.
Le tableau est divisé en trois sections principales :
- Rotations longues 2017 à 2021 : représente 13% de la surface 2021.
- Rotations moyennes 2017 à 2021 : représente 57% de la surface 2021. En détail :
- Céréales à paille & colza & betteraves : 13%
- Céréales à paille & betteraves & pommes de terre : 6%
- Céréales à paille & maïs & betteraves : 6%
- Céréales à paille & colza & légumineuses : 4%
- Céréales à paille & colza & maïs : 4%
- Céréales à paille & colza & pommes de terre : 4%
- Céréales à paille & betteraves & légumineuses : 2%
- Céréales à paille & maïs & pommes de terre : 1%
- Céréales à paille & maïs & légumineuses : 1%
- Céréales à paille & maïs & jachères - prairies : 1%
- Autres rotations moyennes : 15%
- Rotations courtes 2017 à 2021 : représente 30% de la surface 2021. En détail :
- Céréales à paille & maïs : 9%
- Céréales à paille & colza : 8%
- Céréales à paille & betteraves : 7%
- Céréales à paille & légumineuses : 2%
- Céréales à paille & pommes de terre : 1%
- Monoculture de céréales à paille : 1%
- Monoculture de maïs : 1%
- Autres rotations courtes : 2%.
Source : Agreste – Enquête « Pratiques culturales en grandes cultures » 2021.
Note explicative : 13% des surfaces de grandes cultures de 2021 ont reçu une combinaison de céréales à paille, colza et betteraves de 2017 à 2021.
Note : la durée des rotations est mesurée à l’échelle des catégories de culture identifiées dans la présente publication. Les catégories céréales et légumineuses recouvrent des réalités plus variées que les autres.
Des durées de rotation différentes d’une culture à l’autre
Cette répartition entre rotations courte, moyenne et longue n’est pas la même d’une culture à l’autre. Les surfaces de maïs et de céréales à paille de 2021 sont plus souvent associées aux rotations courtes que celles des autres cultures : respectivement 41 % et 36 % (figure 5). Près de 27 % des surfaces de colza de 2021 sont insérées dans des systèmes de rotations courtes, via son association avec les céréales à paille, en particulier le blé tendre. La fréquence des rotations courtes est bien moindre pour la betterave sucrière et devient marginale pour les légumineuses et la pomme de terre.
Le degré d’insertion dans les rotations longues varie aussi beaucoup entre les cultures. Cela concerne 47 % des surfaces de pomme de terre de 2021 (culture gourmande en éléments nutritifs peu adaptée aux rotations courtes) et 30 % de celles de légumineuses (importantes pour leur apport en azote dans les cycles culturaux). Cette proportion tombe à un peu moins d’un quart des terres pour le colza et la betterave sucrière. Le maïs et surtout les céréales à paille, sont moins souvent intégrés aux rotations longues.
Figure 5 - Répartition des surfaces de grandes cultures de 2021 selon la durée des rotations par catégorie de culture
Seuls 4 % des surfaces de céréales à paille de 2021 sont intégrées dans des rotations longues sur la période 2017-2021
Le graphique présente la répartition des surfaces de de grandes cultures de 2021 selon la durée des rotations par catégorie de culture.
Le tableau est structuré en lignes pour chaque culture et en colonnes pour le type de rotation. Les pourcentages indiquent la part de chaque culture dans chaque type de rotation.
- Céréales à paille : 36% en rotation courte, 60% en rotation moyenne, 4% en rotation longue.
- Maïs : 41% en rotation courte, 41% en rotation moyenne, 18% en rotation longue.
- Légumineuses : 6% en rotation courte, 63% en rotation moyenne, 30% en rotation longue.
- Colza : 27% en rotation courte, 50% en rotation moyenne, 23% en rotation longue.
- Betterave : 14% en rotation courte, 62% en rotation moyenne, 24% en rotation longue.
- Pomme de terre : 4% en rotation courte, 49% en rotation moyenne, 47% en rotation longue.
- Ensemble : 30% en rotation courte, 57% en rotation moyenne, 13% en rotation longue.
Source : Agreste – Enquête « Pratiques culturales en grandes cultures » 2021.
Note explicative : 36 % des surfaces de céréales à paille de 2021 sont insérées dans un système de rotation courte sur la période 2017-2021, c’est-à-dire composée au maximum de deux catégories de culture.
Pour en savoir plus :
- "Enquête Pratiques culturales en grandes cultures 2021 - Principaux résultats", Agreste Chiffres et Données n°13, septembre 2024.
- "De profondes mutations dans les exploitations agricoles des Hauts-de-France en 50 ans", Agreste Dossier Hauts-de-France n°5, septembre 2024.
- "Des marges de progrès vers plus d’agro-écologie dans l’utilisation des produits phytopharmaceutiques en grandes cultures", Agreste Dossier Hauts-de-France n°2, septembre 2020.